Villeneuve-sur-Lot (47300)
21-25 Rue des Girondins
Rapin Gaston Roy Lucien Corroyer Edouard Jules
1898-1911
1900-1930
Label XX
Le style « romano-byzantin » adopté pour la nouvelle église Sainte-Catherine à Villeneuve-sur-Lot est dû au coût jugé exorbitant d’un bâtiment gothique en pierre - encore envisagé en 1897- et à l’initiative du député Georges Leygues alors ministre de l’instruction publique, chargé des Beaux-Arts et de l’administration des Cultes. Ce dernier s’adresse à l’architecte diocésain Edouard Corroyer, membre de la Commission des Monuments Historiques, ancien élève de Viollet-Le-Duc et l’un des architectes les plus connus du moment.
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Edouard Corroyer va offrir à la ville les plans d’une église qui rompt avec la tradition néo-gothique diocésaine pour s’inspirer des églises élevées dès les premiers siècles de l’ère chrétienne, bâties suivant le plan des basiliques romaines. La découverte d’un « mouvement architectural extraordinaire » (1) dans la province romaine qu’était la Syrie dès le début du II° siècle ce grâce aux travaux du comte Melchior de Vogué (2) va nourrir plusieurs ouvrages - dont celui publié en 1888 par Corroyer « l’Architecture romane » - et avoir un retentissement sur la production architecturale des bâtiments civils ou religieux.
Ainsi la référence aux monuments de l’Orient qui sont aux origines de l’architecture romane se retrouve dans le parti architectural de l’église Sainte Catherine :
• plan rectangulaire sans transept et chœur en abside,
• nef couverte par des coupoles qui sont contrebutées par les bas-côtés,
• adoption d’un rythme ternaire: trois coupoles, trois vaisseaux, trois chapelles en absides au sud, trois arcades sur colonnes rythmant les travées (comme par exemple dans les églises de Qalb-Louzeh ou de Babouda en Syrie centrale décrites et représentées dans l’ouvrage dont Corroyer est l’auteur).
Les absidioles qui flanquent les côtés sont un emprunt aux édifices ottomans (3). Corroyer a épuré les formes anciennes pour créer une composition simple et claire qui libère un vaste espace éclairé comme dans la basilique paléochrétienne par des fenêtres hautes ouvertes dans les murs de la nef au-dessus de l’héberge des bas-côtés.
Le choix de la brique, produit industriel et bon marché fabriqué sur place (tuilerie-briqueterie Berger- rue Coquard) est également en rupture avec l’usage de la pierre dans l’architecture religieuse de l’époque. L’architecte va utiliser la brique laissée non enduite sur les façades comme à l’intérieur et l’utiliser pour créer des effets de contraste de matière et de couleur avec les éléments de décor du portail et de la nef : pierre blanche des chapiteaux et des motifs sculptés, colonnes de marbre, pour jouer avec les calepinages de l’appareil et créer des corniches avec modillons et bandeaux.
Le clocher remarquable par sa grande hauteur a pu être élevé grâce à la technique de planchers métalliques et dallages ciment. Il est aussi une illustration de l’utilisation ornementale de la brique. Sa forme octogonale dans sa partie haute, les percements des baies différentes à chaque niveau, les tourelles en encorbellement et la tourelle d’escalier hors œuvre rattachée par une passerelle se combinent dans un ensemble savant qui évoque les clochers « toulousains » ou l’art « mudejar » des clochers aragonais (4).
La richesse du décor intérieur en cohérence avec les références architecturales romano-byzantines se manifeste dans la verrière du chœur (1902) du verrier parisien Felix Gaudin, les bandeaux de la nef peints par le villeneuvois Réalier-Dumas (entre 1912 et 1920) qui représentent une double procession de saints, le décor de l’abside du peintre local Antoine Barlangue. Les sculptures des chapiteaux dessinées par Edmond Lesca et exécutées par Antoine Bourlange sont inspirées des modèles de de modèles de Cintheaux, Cognac ou encore Moirax.
Le chantier aura duré 36 ans de 1898 à 1934 (l’ouverture au culte eu lieu en 1911 mais la décoration et certaines élévations n’étaient pas terminées comme le clocher). L’église sera consacrée en 1937.
Corroyer s’était adjoint l'assistance de l’architecte Lucien Roy auteur de la plupart des dessins. Sur place l’architecte communal Gaston Rapin a dirigé les travaux. Après la mort d’Edouard Corroyer en 1904, Lucien Roy et Gaston Rapin seront à l’initiative d’évolutions du projet original : transformation du porche en narthex, surélévation du clocher de deux niveaux avec création d’arcs en mître, petite chapelle des fonts baptismaux de plan tréflé…
Maîtrise d'oeuvre : Lucien ROY (conducteur de travaux, architecte) - Edouard Jules CORROYER (architecte)- Gaston RAPIN
Notes
(1) : Edouard Corroyer L’architecture romane bibliothèque des Beaux-Arts Paris 1888
(2) Syrie centrale Architecture civile et religieuse du Ier au VIIe siècle 1865 -1877 Paris J. Baudry libraire- éditeur
(3) L’église Sainte-Catherine de Villeneuve-sur–Lot Hélène Mousset et Jean-Philippe Maisonnave Le Festin n°44
(4) ibid
Ressources complémentaires / Base Mérimée - Ministère de la Culture et de la Communication